C’est ici que le temps attend, dans la suspension du vol d’hirondelles, de libellules et de chauve-souris ; dans la clarté diminuante de l’ensemble. C’est ici que tout est suspens. Au fond du vallon se découvre un nouveau sentier qui transporte vers un semblant de forêt noire ou de bois des Carpathes, avant de rouvrir sur cette saturation de vert gris qu’est le paysage en Béarn, sous le crachin d’été. À proximité, il y a des années, gisait un renard mort, dans le rui-tort aux écrevisses. Peu importe cette référence au temps, car ici le temps est déphasé. Chaque jour porte son symétrique dans le futur et le passé, à quelques nuances près mais ces nuances donnent sa structure au lieu où tant de vies se sont déposées dans l’argile, les fenaisons et les rangs de vigne, les écorchures et les araires, les socs et les burguesses, l’égrenage du maïs et l’égorgeage du porc. Un cercle ne peut que ramener à cet endroit puisque jamais nous n’en sommes partis totalement. Dans les fumées nocturnes de la médina ou le matin pluvieux près des rizières du volcan Gunung Batur, frottait un fragment d’ici, pris sous le derme. Et y revenir encore et encore, en arpenter encore et encore les coteaux sans bruit, dessine un sens accessible aux seuls oiseaux : vu du ciel.