Clos. Le restaurant avant sept heures. Deux cent quatre-vingt sept appartements sous une nuit sans nuage. Le club face à son environnement hostile, avec une échappée vers la mer, un ponton au-dessus de la dalle du rivage pendant cinquante mètres puis le mur des coraux puis le tombant en pente douce vers le grand bleu. Au-delà de l’enceinte, des barrages rappellent qu’Israël, la Jordanie, l’Arabie sont à portée de vue, toutes acculées en fond de mer Rouge. À sept heures et demie nous sommes les seuls à la mer. Nous vivons quelque chose qui touche au luxe d’un été en janvier, du ressac nocturne entendu depuis notre chambre ouverte sur un carré de pelouse d’où quelques marches mènent à la plage en contrebas, des lumières tremblantes d’Al Aquba sous la rampe des étoiles et dans le même temps et le même espace, l’expérience du tout venant condensé dans ses replis, accoutrements d’estivants, logorrhées de grands voyageurs de club. Nous nous juxtaposons en évitant toute rencontre ou échange. Le poisson-lion et le corail sont-ils moins venimeux ? Voguant sous la voile du boutre Henry de Monfreid, nous mouillons sous le vent de l’île du Pharaon dont le sommet se pique d’un fort fondé par Saladin. L’eau y est plus fine que l’air. La vue touche au sable des fonds. Le tombant est plus accentué. Des bivalves activent leur fente crénelée d’un bleu violet. Même à cinq cents personnes parquées dans cinq mille mètres carrés (bar à volonté, piscines, sonorisations matin midi et soir, restaurant affadi) on peut vivre l’expérience du silence, de l’isolement, du collage sonore entre une fontaine et des oiseaux le matin, de l’eau et des grillons le soir. Le luxe comme un détachement tendu vers quelques essentiels.
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