Le
fleuve est une corde.
Le
hangar A est à l’autre bout du quai, quand la curve s’incline sur la
droite, remontant la Seine à contre-courant, révélant par un raccourci optique
les flèches des deux grues titans jaunes, la flèche noire et la tour blanche de
beurre de la cathédrale.
Le
fleuve est un drap.
Je suis
revenu en voiture. Je trouvais la lumière mordante, j’avais envie d’une série
d’images. Cette séquence est vue et revue. J’en ai le plaisir et la lassitude.
Le
hangar E marque la fin des quais aménagés.
Les
docks 76 vivent leur métamorphose : bientôt, ici, des voitures, des
caddies, des rendez-vous, du commerce de mots et de biens.
Je
serais mieux à vivre en compagnie que de jouer à l’apprenti artiste.
Je
serais mieux auprès de qui je sais.
Je ne
vais pas dévider la litanie des hangars, la musique ce soir est absente de ce
texte en creux.
Je me
lie à la corde du fleuve en le descendant.
Le
fleuve est un
sans
brisure.
Le
fleuve est un prétexte à image ce soir. Sans musique.
Sur le
hangar C je pourrais lire l’initiale de mon nom et sur l’autre rive, au
106, se construit une salle des « musiques actuelles », ce qui
signifie sans place pour les mélodies du passé.
J’ai lu
des élégies d’Emmanuel Hocquard (Conditions
de lumière), apporté un livre de poche à la piscine où je passe plus de
temps hors que dans l’eau (mais ma blessure à la tête va bientôt s’estomper et
je pourrai de nouveau passer des poignées de seconde à vivre une évolution à
l’envers, cherchant à retrouver le poisson enfoui en l’homme), déjeuné seul à
huit heures du matin soleil levant au marché Saint Marc, travaillé sur le thème
des passages, pris une bière à onze heures avec Olivier, une autre à quinze
heures avec Thierry croisé à la piscine. Je me suis senti en vie dans tous ces
moments. Une vie sans questionnement.
Je ne
connais pas la liste de tous les hangars des quais de Rouen et je ne l’ai pas
cherchée.
Les
enfants m’appellent du sud-est de la Corse, me disent être couleur caramel,
s’être baignées avec leurs cousin et cousine dans une eau transparente et plus
chaude encore qu’à Ajaccio.
Le
hangar Z n’existe pas.
J’ai transféré les photographies de l’appareil vers l’ordinateur, survolant la mosaïque des vues en miniature (des lignes de fuite, des couleurs, je me connais, rien ne m’a vraiment sauté aux yeux ; si, au deuxième passage, ces gros plans de lettres publicitaires et ces chiffres sur les bornes d’amarrage).
Où est passée
la musique ce soir ?
Où est
le V de vie, le V de veine,
le 2 d’ensemble ?
double you...
Rédigé par : hermana sin espina | 27/07/2008 à 23:23